Cet homme valait mieux que tous ses ennemis ensemble ; mais je n'ai jamais approuvé ni les erreurs de son livre, ni les vérités triviales qu'il débite avec emphase. J'ai pris son parti hautement, quand des hommes absurdes l'ont condamné pour ces vérités mêmes.
(Voltaire - l'Encyclopédie)

lundi 24 janvier 2011

La réponse de Lutte Ouvrière : "Il faut mettre un coup d'arrêt à cette situation."

HANDICAPES DEUX FOIS : PAR LA VIE ET LA DÉGRADATION DES CONDITIONS SOCIALES

Au cours des deux dernières années de crise économique, la situation des travailleurs s’est brutalement dégradée. Trois millions de femmes et d’hommes, plus de 10 % de la population active, se retrouvent sans travail et sans salaire, deux fois plus en réalité, car les statistiques officielles ne comptabilisent pas les précaires et ceux qui n’ont qu’un emploi momentané.

C’est dans ce contexte qu’il faut évoquer la situation de ceux qui souffrent d’un handicap. Ils sont 12 millions à souffrir d’un handicap plus ou moins lourd, dont une bonne partie vit dans un milieu social défavorisé, subissant de fait une double peine, physique et sociale.

Car le handicap coûte cher : plus la famille a de ressources, plus le dépistage est précoce et les remèdes apportés efficaces. Les ouvriers sont deux fois et demie plus souvent hébergés dans des institutions (six fois plus pour leurs enfants) que les cadres supérieurs, les familles ouvrières n'ayant ni la place ni surtout les moyens d'employer une aide à plein temps. Quant aux équipements, pourtant indispensables pour rendre la vie moins contraignante, ils ne sont pas à la portée de toutes les bourses. Aménager son logement ou son véhicule en fonction de son handicap coûte cher, les aides sont insuffisantes. Ainsi, moins d'un dixième des personnes utilisant un fauteuil roulant en possèdent-elles un électrique.

Au lieu d’accroître les aides qui permettraient d’aider ceux qui souffrent d’un handicap, l’État diminue de plus en plus les fonds publics et en particulier ceux consacrés à la santé. Il a mis des centaines de milliards à la disposition des financiers responsables de la débâcle économique et maintenant il récupère cet argent sur tout ce qui est utile à la majorité de la population. La population handicapée en subit directement les conséquences.

Des ressources scandaleuses, 1,3 million de handicapés « vivent », si on peut dire, avec le minimum invalidité ou une allocation adulte handicapé (AAH). 800 000 touchent cette AAH qui se monte à 711.95 euros par mois depuis le 1er janvier 2011, alors que le seuil de pauvreté était de 791 euros en 2008 (dernière année connue) ! Et les handicapés doivent payer les franchises médicales et font les frais de la hausse brutale du coût de la vie.

Les bénéficiaires de l’AAH bénéficiaient, jusqu’en 2000, de l'AMG (Aide Médicale Gratuite). Elle a été supprimée et remplacée par la CMU (Couverture Maladie Universelle), mais le plafond de ressources donnant droit à la CMU (634,25 euros en 2010) a été fixé délibérément en dessous du montant de l’AAH !

Depuis le 1er janvier 2009, des familles ont découvert que les frais de transport des personnes handicapées dont elles avaient la charge, entre leur domicile et leur centre de soins, ne leur étaient plus remboursés que très partiellement. Auparavant, ce coût des transports était pris en charge à 100 % par l'assurance-maladie, sur simple avis médical. Ces remboursements sont désormais intégrés dans la prestation de compensation du handicap (PCH) qui les plafonne à 200 euros par mois. Selon le président de l'Association des paralysés de France, cette somme est consommée en seulement cinq jours pour des enfants habitant à 30 kilomètres de leur école.

Quant aux 900 000 handicapés capables de travailler, leur situation est tout aussi difficile. Même d'après Sarkozy, près d'un sur cinq est au chômage (17 %), soit le double de la moyenne nationale officielle. Les chiffres vont jusqu’à 26 % selon les sources. Le taux des chômeurs de longue durée, qui était de 33 % pour l’ensemble des chômeurs fin 2009, grimpait à 50 % pour les handicapés !

Il existe bien depuis 1987 une loi censée contraindre les patrons d'entreprises de plus de 20 salariés à embaucher au moins 6 % de travailleurs handicapés. Mais cette loi est peu respectée et les patrons préfèrent encore verser une contribution prévue par la loi, pour se substituer à ces embauches, plutôt que d’accueillir des travailleurs pour lesquels il faut aménager des bureaux, des postes de travail ou encore des moyens d'accès dans l'entreprise.

Sarkozy propose d'augmenter les pénalités prévues, mais il se garde bien de donner l'exemple en embauchant dans les services de l'État, alors que la proportion de handicapés n'y est que de 3,1 %.

Désengagement financier de l’État : il s'est peu à peu désengagé du financement de l’APA (Allocation Personnalisée d’Autonomie), au nom de la décentralisation, et sa participation est passée de 43 % en 2002 à 28,5 % en 2010. Ce sont les départements qui ont dû prendre la relève sans obtenir la compensation financière équivalente.

Les Maisons du handicap (MDPH) ont été créées en janvier 2006 par le gouvernement. Quatre ans après leur création, ce sont les directeurs des MDPH qui ont tiré le signal d’alarme. L’État leur devait des dizaines de millions d’euros à raison de plus d’un million par maison départementale.

La FAGERH (Fédération des Associations Gestionnaires et des Etablissements de Réadaptation pour Handicapés) dénonce des coupes sans précédent et a protesté fin 2010 contre les mesures financières décidées par le gouvernement : 60 millions seront ponctionnés sur les caisses de l’AGEFIPH (Association pour la Gestion du Fonds pour l'Insertion Professionnelle) en 2011 et 2012 et 123 millions sur la formation professionnelle.

La scolarisation des enfants handicapés mise à mal : la loi de 2005 faisait obligation aux écoles d'inscrire les enfants handicapés. Si leur nombre a augmenté, 13 000 d’entre eux n’ont toujours pas trouvé de solution et de nombreux enfants n’ont que quelques heures de cours par semaine. En effet, faute de moyens de transport, de bâtiments accessibles ou d'auxiliaires de vie scolaire (AVS) assez nombreux, ils ne peuvent pas être accueillis.

L’UNAPEI (association de parents) dénonce les restrictions budgétaires, les emplois précaires, les suppressions de postes et réclame la création de 15 000 places en Établissements et services adaptés.

Ce n’est pas l’orientation que prend le gouvernement : à la veille de la rentrée scolaire 2009, 30 000 salariés de l’Éducation Nationale en contrat précaire ont été mis dehors.

A compter de 2011, le gouvernement ne financera plus que 390 000 contrats aidés - 340 000 dans le secteur associatif et public et 50 000 dans le secteur privé - contre 520 000 auparavant. En 2012, il n'y en aura plus que 270 000 dans le public et, en 2013, 200 000 seulement. Une partie d’entre eux remplissaient un rôle très important dans l’aide aux élèves handicapés.

Ce tableau rapide de la situation des personnes handicapées dans le pays est loin d’être complet mais il révèle tous les reculs accumulés.

Il faut mettre un coup d’arrêt à cette situation. La première des exigences de la part du gouvernement serait de faire droit aux revendications de toutes les associations représentant les handicapés, qu’il s’agisse d’enfants ou d’adultes. Elles sont nombreuses et publiques.

Mais le sort des handicapés ne peut être dissocié du sort général de la population dont ils font partie.

Les attaques menées depuis des années par le patronat et les gouvernants à son service portent sur tous les aspects de la vie sociale, car il s’agit pour eux de dégager le maximum d’argent pour multiplier les cadeaux à la grande bourgeoisie et lui permettre de maintenir ses profits malgré la crise.

Les catégories les plus fragiles de la population, dont les handicapés font partie, sont touchées en premier lieu, mais leur avenir est directement lié aux capacités de toute la population laborieuse à inverser le cours des choses.

En se mobilisant massivement, celle-ci peut imposer le contrôle sur la vie économique, les finances, les répartitions budgétaires, les banques et leurs bénéfices.

C’est la seule façon de contraindre les gouvernements d’aujourd’hui et demain à donner un coup d’arrêt aux régressions sociales dont les handicapés sont doublement victimes.

Pour le secrétariat de Lutte Ouvrière

Martine ANSELME

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